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Les militants syndicaux sont-ils si dangereux ? Si oui, alors pour qui ?

Aujourd’hui, on dénie aux militants leur devoir de résistance et même leur droit à l’humour tandis qu’on flatte avec bienveillance les patrons licencieux et les tenants de la finance internationale.

Quelques jours avant le 1er mai, la commission des lois de l’Assemblée nationale a rejeté sur demande du gouvernement la proposition de loi d’amnistie des infractions et délits commis depuis 2007 par des salariés, du privé comme du public, lors de conflits du travail et d’activités syndicales, y compris lors de manifestations. Des membres du gouvernement ont même avoué que le Président de la République n’avait jamais eu l’intention d’amnistier les syndicalistes.

A l’inverse, le patronat va obtenir un permis d’appauvrir et de licencier à l’abri des recours à la justice avec le projet de loi sur la flexibilité. La casse de l’inspection du travail fournit au patronat l’assurance d’être moins soumis aux pénalités pour violations du droit du travail. Et enfin, avec le choc de simplification administrative, les dirigeants d’entreprises obtiennent une incitation légale à la fraude sociale et fiscale.

Interrogeons-nous ! Qui sont les délinquants aujourd’hui ? Les syndicalistes qui défendent leur emploi et leur vie ou le patronat à qui le pouvoir donne toute licence ? Qui sont les criminels ? Les salariés en position de légitime défense ou les patrons qui brisent des familles et des vies ?

La culpabilisation des salariés est une vieille méthode pour obtenir d’eux qu’ils se taisent et que soit maintenu le déséquilibre structurel de leur contrat de travail. Mais aujourd’hui, la politique gouvernementale d’austérité est telle qu’on attaque de plus en plus violemment les syndicalistes comme le montre l’explosion du nombre des actions pénales menées contre eux.

A ce titre, l’exemple du « Murs des cons » du Syndicat de la Magistrature est significatif. Toutes les voix de l’UMP, du patronat et d’une partie du gouvernement se font entendre pour condamner cette blague potache d’avoir épinglé sur un panneau les photos des personnalités politiques ennemis du monde du travail. Il s’agit pourtant d’un local privé et les images ont été prises en catimini, malgré cela, des actions sont envisagées pour attaquer ce syndicat.

Où en sommes-nous, sinon au triste constat d’une volonté de déstabilisation - y compris de la part d’un gouvernement de « gauche » - des organisations qui tentent de préserver les intérêts matériels et moraux des travailleurs !

Mais cette déstabilisation ne passe pas seulement par l’attaque des syndicalistes ou des syndicats, elle tient aussi dans le rôle qu’on tente de leur faire jouer dans la période. Le gouvernement s’est lié les mains en transposant en loi organique la « Règle d’or » d’équilibre budgétaire réclamée par le dernier traité de l’Union européenne (Traité sur la stabilité, la coordination, et la gouvernance – TSCG) signé par Sarkozy et ratifié par Hollande – dont il faut rappeler qu’une grande partie de ses composantes avaient été rejetées par le peuple lors du référendum contre le Traité constitutionnel européen en 2005 (TCE).

Cette transposition a pour conséquence un talon de fer budgétaire, des suppressions de dépenses publiques et de missions de services publics. Cette transposition en droit français a aussi pour conséquence la recherche d’un compromis avec les organisations syndicales pour les amener à accompagner toutes les réformes en cours qui sont directement en rapport avec la réduction des dépenses publiques : modernisation de l’action publique (MAP, ex-RGPP), acte III de la décentralisation (territorialisation des missions), accord national interprofessionnel (ANI).

Cette tentative de compromis avec les organisations syndicales est historique, car elle signe d’une part l’impuissance du gouvernement à assumer ses choix budgétaires, mais d’autre part elle manifeste la volonté explicite de mettre fin à l’indépendance des organisations syndicales et de bouleverser les rapports sociaux. Elle va dans le sens d’un nivellement des revendications, de la disparition d’une liberté de réflexion et d’action des salariés ainsi que d’une manipulation des consciences.

Le pouvoir en place adresse ainsi un signal fort au monde du travail pour lui exposer que la répression sera effective et sans appel : salariés ligotés par des accords iniques, syndicats verrouillés par un dialogue vertical, syndicalistes et militants pénalement poursuivis.

Il nous faut donc rester plus que vigilants sur la période, tant sur la défense des droits et des garanties que sur la structure et la nature du dialogue social. Car il y va de notre capacité à nous défendre et en définitive de notre liberté.

Article publié le 24 mai 2013.


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